Dix (expo 2010)


« Dix tableaux, dix photos, quelques mots... »

Photos de Myriam Le Belleguy / Peintures d'Alexandre Cornily

Il y a celui qui peint.
Il y a celle qui photographie.
Il y a celui qui écrit.
Celle qui photographie ne connaît pas celui qui écrit. Celui qui peint est un ami proche de celle qui photographie. Celui qui peint et celui qui écrit se connaissent un peu.
Au début, c’est une idée qui germe dans la tête de celui qui écrit.
Puis vient une rencontre, une discussion et un délire… l’affinité, le goût du challenge, l’envie de partager font le reste.
Celui qui écrit fournit une vingtaine de textes. Celui qui peint et celle qui photographie en choisissent un certain nombre puis mettent en commun leurs choix. Au final, dix textes sont choisis. Parce que ces dix textes là leur parlent.
Celui qui peint vous le dira, certains textes sont évidents : l’image s’imprime d’elle-même et il voit le tableau terminé dans sa tête dés la première lecture… D’autres sont plus douloureux…
Celle qui photographie voit aussi des évidences. Mais le travail est long pour obtenir la photo qu’elle imagine. Celle qui photographie ne connaît toujours pas celui qui écrit et se demande bien qui il est.
Celui qui écrit n’a pas encore vu le travail de celle qui photographie et de celui qui peint. Il attend avec une certaine impatience et avec inquiétude aussi car c’est la première fois qu’il verra l’interprétation de ses textes…
Le 9 avril 2010 aura été l’aboutissement de l’idée qui les avait réunis.
 

Contenance





Ne vous inquiétez pas, vous autres les passants
Qui n’êtes qu’éphémères dans ma vie et mon cœur :
Vous me faites souffrir sans que je trouve lassant
De supporter vos peines pour en faire mon malheur.

J’accuse tous les coups, même les plus douloureux,
Sans jamais me défendre, ni haine, ni mépris.
L’amour seul me délivre et fait luire dans mes yeux
Cette flamme superbe qui m’en a tant appris.

Pour n’importe quelle blessure, elle est un baume unique
Que l’on soit avec moi ou charmant, ou cynique,
Il me reste ce chemin que personne ne peut suivre.

Mais c’est un bouclier qui peut devenir arme
Et quand l’amour domine, à travers les larmes,
J’aimerai, avec lui, pouvoir tout détruire.





Jolie métisse


 Jolie métisse au cœur tatoué
Le teint brûlé, ivre de vie
Les yeux perlés, ensoleillés
Cheveux crêpés, pleins de folie

Vie d’aujourd’hui, vie métissée
Cliché sauvage, au cœur d’une foule
Pourquoi ces yeux, cette peau lissée
Entraînent mon cœur dans une houle

Attrait du rêve et de la vie
Besoin d’amour et de chaleur
Envie de rien, envie d’envie
Cette envie sourde de douceur

Histoire de train, furtive esquisse
Regard en coin, arrière pensée
Envers cette fille, jolie métisse
Son corps bronzé, sa peau lissée.

  

 Errance



Un peu plus tard dans la nuit,
Mon cœur se perd en solitude
Et en plein cœur de Paris,
Je reste jouer les noctambules.

Baiser furtif, baiser volé,
Baiser sûrement jamais donné,
Mon rêve s’effondre dans ma tête
Bien avant même d’avoir été.

Sourire éclair d’un regard
Qui m’a touché dans cette gare
Et qui m’a mis le cœur en fête,
Depuis longtemps si déprimé.

Un peu plus tard dans ma vie,
Toujours ce vide intense en moi ;
A la recherche du grain d’folie
Qui me fera devenir moi



  

Deux ans d’attente

 




Quand il revient chez lui, il pousse l’interrupteur,
Il allume la télé, il arrose ses fleurs,
Il va vers le frigo d’où il retire une bière,
Un morceau de Pizza et un bout de gruyère.

Assis dans un fauteuil, il grille une cigarette.
Le morceau de pizza, posé dans son assiette,
Sera à peine touché : il n’a pas faim ce soir.
Il attend la fatigue pour arrêter de boire.

Allongé maintenant, il attend le sommeil,
Mais comme d’habitude, ses sens sont en éveil,
Et cette nuit s’annonce comme les précédentes.

Il espère le bruit de Sa clé dans la serrure,
Son pas sur la moquette, un sourire pas très sur
Et quelques mots d’excuses… Déjà deux ans d’attente.


Veillée

 

 

 

Des ombres folles dansent, reflets du feu dans l’âtre,
Et animent la pièce où tout est immobile.
A la lumière des flammes, tout semble bien fragile
Et l’on craint qu’en un souffle, on puisse tout abattre.

Le temps s’est arrêté, seules les bûches indiquent
Que le feu brûle déjà depuis assez longtemps ;
Autour de la table, debout, il y a des gens,
Mais seul le silence fait jouer sa musique.

Sur la table, au milieu, il y a un drap blanc,
Sous lequel on devine une forme d’enfant,
Qui ne reverra plus son cœur s’ensoleiller.

On dirait un tableau, si ce n’était le feu,
Qui projette sur les murs le reflet de ses jeux
Et augmente encore l’ambiance de la veillée.




La maison


 





















Le vieil appartement vient de perdre son âme
Esseulé, appauvri car vidé de ses meubles,
Il sent la mort venir et s’éteindre la flamme
Qui lui donna la vie et le rendra aveugle.

Dans un coin d’une pièce, vestige du temps passé,
Une canette de bière, renversée, comme morte,
Résonne encore des rires de ceux qui l’ont laissée
Pour aller s’enfermer derrière une autre porte.

Par endroits, sur les murs, des traînées de larmes
Agrandissent les fissures qui donnaient de son âme
Au vieil appartement aujourd’hui délaissé.

J’ai perdu un ami, mon ami le plafond,
Dans cet appartement que j’app’lais maison
Et j’ai perdu aussi un peu de mon passé.


Funambule

 

 

Funambule éphémère
Accroché à son fil
Equilibre précaire
Entre ciel et terre
Devant ses yeux défile
Sa vie de solitaire


Le vieux




Toujours la même place et depuis des années,
Devant son café crème, la casquette bien vissée
Sur sa tête bien ridée. A ses cotés, sa canne
Fidèle, en cas de fatigue, en cas de panne.

Après le café crème, dernier petit café
Comme un coup de fouet pour ses vieilles artères
Qui supportent son corps, maintenant fatigué
D’être resté debout, pendant longtemps, sur terre.

Un sursaut d’énergie et enfin il se lève,
Il va ouvrir la porte, le vent va s’engouffrer,
Mais le vieux va sortir sans se décourager.

Cela fait des années qu’il n’y a pas de trêves,
Ce n’est même plus un homme, c’est un meuble usé,
Dont les patrons cherchent à se débarrasser.



Comptoirs




Me voilà revenu dans cet observatoire
Où la psychologie et la philosophie
Se rencontrent au comptoir
Pour échapper, dehors, au vent ou à la pluie.

Bien sur, en d’autres lieux, il y a des regards
Qui nous font observer et parfois comprendre
Des peines, des craintes ou même des espoirs
Sur des visages vidés et las d’attendre.

Mais trouve-moi dans un de ces sordides bars,
Et regarde ces gens qui vomissent des yeux
Les larmes alcooliques de leurs jours malheureux,

Et tu verras alors, si tu restes assez tard,
Un sourire perdu sur un visage défait
Exprimer gravement un sentiment de paix.



J’ai noyé notre amour

 




J’ai noyé notre amour
Dans un corps anonyme
Pourtant au petit jour
Une douleur infime
Etait présente encore
Une image acérée
Souvenir de ton corps
Par d’autres bras serrés.


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